Port Lockroy I Tristan Guyon I
Port Lockroy, ancienne base antarctique anglaise, c'est un refuge de montagne, une "cabane" suisse posée à quelques mètres de la mer, dans la baie que notre bon Charcot avait repérée en 1904 et baptisée du nom d'Edouard Lockroy, ministre français. C'est un vrai havre. Nous sommes au mouillage et amarrés aux rochers de tout bord, protégés des quatre vents. Nos alpinistes, (nos poussins...) sont en montagne. Le menu du jour : le pic Savoia (ou du Duc des Abruzzes, un choix de Charcot) est du type "GOULOTTE" c'est-à-dire ; Entrée : soupe (à brasser jusqu'au ventre). Plat principal : meringue choucroutée. Dessert sommital : champignon géant givré à
servir salé et à ne goûter que si le créneau météo le permet, prévoir piolets à ailettes.
Dod, Mat et Pat ont chacun leurs modèles prototypes de piolets à ailettes ; en bons conseillers techniques ils diront que les leurs sont les meilleurs, ceux des autres sont nuls.
Nous guettons aux jumelles leur progression depuis le bateau. Le temps est bouché. O météo, ton créneau, ton créneau change un peu trop !...
Nous assistons en ces lieux solitaires à un étrange ballet de visiteurs débarqués par grappes, selon le bon vouloir de la base anglaise, de paquebots ou "cruise ships" aux noms fiers tels que Sea Explorer, Sea Adventure, Ocean Explorer, etc… Les voiliers qui passent s'appellent plutôt Santa Maria Australis, Australis, toujours très australis…
La base de Port Lockroy, devenue musée et boîte aux lettres antarctique est tenue par quatre jeunes femmes. La "patronne" nous semble sévère, les autres moins… Je n'en dirai pas plus, d'autant que mon acolyte râleur a peut-être déjà dressé leur portrait en cachette, le bougre…
A suivre. A bientôt, nous serons plus Sud, plus solitaires.ci les Voyageurs Immobiles : tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté ou presque. Il fait froid et gris ; nous sommes à l'abri entre des îlots (Melchior). On pourrait se croire à Chausey (pour les amis de Saint Malo ou Granville)avec curieusement du blanc partout,une couche de glace épaisse qui nous protège de la mer et du vent.Le danger viendrait plutôt des possibles chutes de séracs !
Les "chamoniards " dorment et dorment comme des marmottes. Ils emmagasinent pour le Grand Jour tandis que nous autres marins vaquons, fourbissons sans cesse à diverses activités indispensables pour que Ada II soit au top !
Vivement le grand beau. En fait, notre refuge de montagne flottant est très convivial : repas (qu'est-ce qu'on mange à midi ?), films, jeux de cartes et bien sûr apéro du soir ; nous avons dernièrement écouté le bruit, que dis-je, le son d'un glaçon antarctique libérant dans un whisky de 12 ans d'âge ses bulles d'un air emprisonné depuis "au moins 80 000 ans". Majeur.
Patrick, notre glaciologue émérite peut répondre à toutes les questions en cas de doute.
Un grand salut à vous tous du Nord qui vivez le long hiver ! Ici, c'est pareil, mais c'est l'été.