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La délicate récupération des alpinistes I Isabelle Autissier I

"Bon,... le zodiac, rentrez au bateau, ça le fait pas ! C'est comment pour vous à terre ?"
"Ça déferle toujours, plus que jamais, même."
" Bon, c'est bien ce que je vois, alors on laisse tomber pour cette nuit, nous on reste en stand-by dans la baie ; on verra si ça passe demain, vous avez encore à manger ?"

"Un peu de semoule, ça ira. On va planter la tente à l'abri des séracs, mais nous sommes un peu trempés à cause de la vague."

Voilà. La récupération des alpinistes est impossible à cause de la houle, ça devait arriver. Sur l'île Smith, nous avons épuisé notre capital chance, grâce à un vent d'est persistant et à une langue de cailloux bien placée qui évitait aux vagues de déferler. Mais là... sur l'île Brabant, c'est une autre histoire.
Il y a trois jours, quand nous les avons déposés, c'était calme plat. Malgré tout, dans cette baie totalement ouverte au large, les vagues roulaient sur de gros blocs inégaux ; parfait pour se tordre les pieds ou mieux, tomber et se prendre l'annexe dans la figure. Les combinaisons de survie rendent l'exercice moins dangereux, mais les marins du bord avaient déjà noté que dans les meilleures conditions, ça n'était déjà pas simple.
Aujourd'hui, il souffle un vent de sud-ouest  de 15/20 nœuds. Pas de quoi fouetter un chat, au large. Mais, sur la côte, c'est la Bérézina ! Un bon mètre d'écume bouillonne entre nous et nos amis alpinistes. Le zodiac peut se faire rouler ; une tête qui donne sur une pierre, une main qui se prend dans l'hélice du moteur à l’envers. C'est rageant de les voir à quelques mètres, fatigués après leur brillante ascension du mont Parry, rêvant de repos. Ils sont là, à travers la brume d'embruns et pourtant presque sur une autre planète. Qui plus est, alors qu'ils avaient étalé toutes leurs affaires à sécher sur la plage, une vague beaucoup plus haute, sans doute due à une chute de sérac, les a surpris. Ils sont trempés.
 Personne ne va beaucoup dormir, dans ce demi-jour de la nuit australe. Nous, ballotés par le clapot dans la baie et eux serrés dans leur tente. Toutes les trois heures, un coup de VHF rassure tout le monde.

"Ça va les gars ? Comment c'est chez vous ?"
"Pareil, pareil."
"OK, les prévisions météo ne donnent pas de vent d'est avant après demain."
"Bon, on attendra, s'il faut."

Moi, j'espère une accalmie en fin de nuit, ce qui est fréquent ici. De fait, vers 3 heures du matin, ça prend meilleure tournure. A 5 heures, on déclenche les opérations. La marée basse et une nappe de petite glace issue du glacier voisin contribuent à calmer le jeu.
"Grouillez-vous de démonter la tente, je ne sais pas combien de temps cela va durer."
Une heure et demie plus tard, tout le monde est à bord. Ouf !
Finalement les dangers de la navigation en Antarctique ne sont pas toujours ceux que l'on pense.  Nous le savions... Dont acte !

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