NO MAN'S LAND PROJECT 2010

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> Ascension / Mont Parry - Ile Brabant I 21-24 janvier 2010 I

I Mathieu Cortial I

Arête nord-ouest du mont Parry "Nouvelle vague"

Jeudi 21 janvier : après huit jours d'attente et un repérage de la face tant convoitée, nous partons enfin pour une tentative du mont Parry. Nous ne sommes qu'à 2 h de bateau etpar chance nous avons le privilège d'être encouragés et accompagnés par une colonie de baleines à bosses. A 9 h, nous posons le pied sur l'île Brabantsans aucune difficulté (ça peut vous paraître logique et pourtant !). Cette fois-ci, nous transportons des gros sacs, chargés du matériel nécessaire pour faire un bivouac. Du coup, nous sommes lourds. Le manteau neigeux est tellement pourri que régulièrement, nous nous enfonçons jusqu'au menton. Nous sommes trop couverts pour le début de cette ascension et nous avons très chauds si bien que très rapidement, nous nous retrouvons complètement trempés, moins par la neige que par la transpiration !
Évidemment, c'est lorsque nous sommes complètement mouillés que le coup de froid arrive. Vers 1 150 mètres d'altitude, nous n'avons plus aucune visibilité. Nous sommes alors sur une arête « agrémentée » de corniches de neige et crevasses. C'est à l'unanimité que nous décidons de planter la tente, même si idéalement nous aurions préféré nous arrêter 500 mètres plus haut ! Les précipitations neigeuses sont finalement faibles, mais nous passons quand même 39 heures sous la tente sans pouvoir apercevoir le sommet.
Heureusement, notre routeur Yan Giezendanner nous annonce un créneau météo favorable de 2 jours, alors nous n'hésitons pas à grimper 1 000 mètres plus haut pour voir si l'on peut distinguer le sommet. Nous sommes très bien protégés des séracs sur notre arête, mais il y a des crevasses partout qui nous obligent parfois à faire quelques détours. Plus nous montons, plus l'itinéraire se révèle élégant et logique. Les formations de givre sont splendides et les pentes de glace que nous empruntons s'apparentent à un style que nous connaissons bien. A 500 mètres du sommet, le doute nous envahit sévèrement : les champignons de givre au pied desquels nous arrivons sont énormes, déversants et sans aucune cohésion.

Patrick s'investit comme un beau diable dans une longueur, en défiant totalement les lois de la gravité. Imaginez-vous en train de grimper dans une neige en fin de saison, à la verticale et vous aurez une petite idée du terrain auquel nous nous sommes confrontés. Dod  fait de même dans les deux longueurs suivantes qui cette fois-ci ressemblent à des tunnels de givre parfois déversants. Derrière, nous grimpons souvent avec deux sacs, car le chef de la cordée n'en a pas, et sans ailette au niveau des piolets, car le leader a les miennes !
Ça commence à faire beaucoup de handicaps pour un terrain coté ED (Extrêmement Difficile). 4 heures plus tard et 100 mètres plus haut, nous arrivons enfin au sommet.


Nous sommes le 23 janvier, il est 18 h et nous sommes littéralement sur une autre planète. La lumière est magnifique, les îles qui nous entourent ressemblent à des confettis pour les plus petites, et à des îles volant dans les brumes pour les plus grosses, le tout dans un univers sculpté dans tous les sens par du givre. Absolument Magique !!! Nous en prenons plein les yeux.
A minuit, après 18 heures d'ascension, nous arrivons à la tente, heureux et la tête encore là-haut. Le lendemain, nous arriverons sur notre plage vers 13 h, nous pensons alors que l'ascension est terminée. Malheureusement, les vagues sont bien trop grosses pour que l'on puisse être récupérés. Pas de problème, il fait chaud et il nous reste de la nourriture.
6 heures plus tard, alors qu'Isa nous annonce qu'il va falloir attendre un jour ou deux en économisant la nourriture, une vague haute de trois mètres nous inonde totalement en essayant de nous embarquer du matériel et des vêtements.


Dod est trempé, nous avons perdu notre nourriture dans la bataille et la nuit arrive. Il va falloir trouver un endroit pour dormir. Patrick et moi rhabillons Dod de la tête au pied et pendant qu'il se réchauffe au fond d'un duvet, nous creusons une terrasse dans la neige pour pouvoir planter la tente.
Après une nuit blanche sans duvet, je sors en observant les vagues toutes les 2 heures. A 5 h du matin, je m'aperçois que la houle a diminué franchement. En moins d'une demi-heure nous sommes prêts à embarquer. Une ascension en Antarctique se termine toujours au bateau et une plage même ensoleillée n'est pas forcément hospitalière. C'est notre leçon du jour.

TOPO et INFOS ASCENSION :

Arête NW du Mont Parry (alt 2520 m.)
Voie "Nouvelle vague"
Déniv : 2520 m
Difficulté : ED
Voie non homogène : arête longue, en neige de la mer jusqu’à 300 m du sommet (environ D), puis un itinéraire très malin slalomant entre les champignons par d'abord une pente de glace à 60 degrés puis des petits passages verticaux, puis des champignons de givre. Les derniers 80 mètres sont très durs ; une arête de champignons sans consistance, un rappel sur la gauche de 30 m pour éviter un dévers givré et une dernière longueur de 60 m verticale parfois en givre.
Date : 21 au 24 janvier. Dépose a 10h, camp sur l’arête à 16h à 1100 m d’alt.
Arrêt à cause de la neige du 21/01 (16h) au 23/01 (6h). Sommet à 18h le 23/01, retour à la tente à minuit. Nuit sous la tente. Descente le 24 entre 9h et 13h. Récupération par les marins le lendemain 25/01 à 6h du matin, après une vague dévastatrice le soir du 24/01 à 20h.
Descente par le même itinéraire en rappels et désescalade.

VIDEO I Ile Brabant. Mont Parry. Durée 6mn 29s


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